Les Heures Claires, Верхарн Эмиль, Год: 1896

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The Project Gutenberg EBook of Les Heures Claires, by Emile Verhaeren
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Title: Les Heures Claires
Author: Emile Verhaeren
Release Date: January 11, 2004 [EBook #10061]
Language: French
Character set encoding: ISO Latin-1
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Em. Verhaeren
Les heures claires
1896
O la splendeur de notre joie,
Tisse en or dans l’air de soie !
Voici la maison douce et son pignon lger,
Et le jardin et le verger.
Voici le banc, sous les pommiers
D’o s’effeuille le printemps blanc,
A ptales frlants et lents.
Voici des vols de lumineux ramiers
Plnant, ainsi que des prsages,
Dans le ciel clair du paysage.
Voici — pareils des baisers tombs sur terre
De la bouche du frle azur —
Deux bleus tangs simples et purs,
Bords navement de fleurs involontaires.
O la splendeur de notre joie et de nous-mmes,
En ce jardin o nous vivons de nos emblmes !
L-bas, de lentes formes passent,
Sont-ce nos deux mes qui se dlassent,
Au long des bois et des terrasses ?
Sont-ce tes seins, sont-ce tes yeux
Ces deux fleurs d’or harmonieux ?
Et ces herbes — on dirait des plumages
Mouills dans la source qu’ils plissent —
Sont-ce tes cheveux frais et lisses ?
Certes, aucun abri ne vaut le clair verger,
Ni la maison au toit lger,
Ni ce jardin, o le ciel trame
Ce climat cher nos deux mes.
Quoique nous le voyions fleurir devant nos yeux,
Ce jardin clair o nous passons silencieux,
C’est plus encore en nous que se fconde
Le plus joyeux et le plus doux jardin du monde.
Car nous vivons toutes les fleurs,
Toutes les herbes, toutes les palmes
En nos rires et en nos pleurs
De bonheur pur et calme.
Car nous vivons toutes les transparences
De l’tang bleu qui reflte l’exubrance
Des roses d’or et des grands lys vermeils :
Bouches et lvres de soleil.
Car nous vivons toute la joie
Darde en cris de fte et de printemps,
En nos aveux, o se ctoient
Les mots fervents et exaltants.
Oh ! dis, c’est bien en nous que se fconde
Le plus joyeux et clair jardin du monde.
Ce chapiteau barbare, o des monstres se tordent,
Souds entre eux, coups de griffes et de dents,
En un tumulte fou de sang, de cris ardents,
De blessures et de gueules qui s’entre-mordent,
C’tait moi-mme, avant que tu fusses la mienne,
O toi la neuve, toi l’ancienne !
Qui vins moi des loins d’ternit,
Avec, entre tes mains, l’ardeur et la bont.
Je sens en toi les mmes choses trs profondes
Qu’en moi-mme dormir
Et notre soif de souvenir
Boire l’cho, o nos passs se correspondent.
Nos yeux ont d pleurer aux mmes heures,
Sans le savoir, pendant l’enfance :
Avoir mmes effrois, mmes bonheurs,
Mmes clairs de confiance :
Car je te suis li par l’inconnu
Qui me fixait, jadis au fond des avenues
Par o passait ma vie aventurire,
Et, certes, si j’avais regard mieux,
J’aurais pu voir s’ouvrir tes yeux
Depuis longtemps en ses paupires.
Le ciel en nuit s’est dpli
Et la lune semble veiller
Sur le silence endormi.
Tout est si pur et clair,
Tout est si pur et si ple dans l’air
Et sur les lacs du paysage ami,
Qu’elle angoisse, la goutte d’eau
Qui tombe d’un roseau
Et tinte et puis se tait dans l’eau.
Mais j’ai tes mains entre les miennes
Et tes yeux srs, qui me retiennent,
De leurs ferveurs, si doucement ,
Et je te sens si bien en paix de toute chose,
Que rien, pas mme un fugitif soupon de crainte,
Ne troublera, ft-ce un moment,
La confiance sainte
Qui dort en nous comme un enfant repose.
Chaque heure, o je pense ta bont
Si simplement profonde,
Je me confonds en prires vers toi.
Je suis venu si tard
Vers la douceur de ton regard
Et de si loin, vers tes deux mains tendues,
Tranquillement, par travers les tendues !
J’avais en moi tant de rouille tenace
Qui me rongeait, dents rapaces,
La confiance ,
J’tais si lourd, j’tais si las,
J’tais si vieux de mfiance,
J’tais si lourd, j’tais si las
Du vain chemin de tous mes pas.
Je mritais si peu la merveilleuse joie
De voir tes pieds illuminer ma voie,
Que j’en reste tremblant encore et presqu’en pleurs,
Et humble, tout jamais, en face du bonheur.
Tu arbores parfois cette grce bnigne
Du matinal jardin tranquille et sinueux
Qui droule, l-bas, parmi les lointains bleus,
Ses doux chemins courbs en cols de cygne.
Et, d’autres fois, tu m’es le frisson clair
Du vent rapide et miroitant
Qui passe, avec ses doigts d’clair,
Dans les crins d’eau de l’tang blanc.
Au bon toucher de tes deux mains,
Je sens comme des feuilles
Me doucement frler ,
Que midi brle le jardin.
Les ombres, aussitt recueillent
Les paroles chres dont ton tre a trembl.
Chaque moment me semble, grce toi,
Passer ainsi divinement en moi.
Aussi, quand l’heure vient de la nuit blme,
O tu te cles en toi-mme,
En refermant les yeux,
Sens-tu mon doux regard dvotieux,
Plus humble et long qu’une prire,
Remercier le tien sous tes closes paupires ?
Oh ! laisse frapper la porte
La main qui passe avec ses doigts futiles ,
Notre heure est si unique, et le reste qu’importe,
Le reste, avec ses doigts futiles.
Laisse passer, par le chemin,
La triste et fatigante joie,
Avec ses crcelles en mains.
Laisse monter, laisse bruire
Et s’en aller le rire ,
Laisse passer la foule et ses milliers de voix.
L’instant est si beau de lumire,
Dans le jardin, autour de nous,
L’instant est si rare de lumire trmire,
Dans notre cur, au fond de nous.
Tout nous prche de n’attendre plus rien
De ce qui vient ou passe,
Avec des chansons lasses
Et des bras las par les chemins.
Et de rester les doux qui bnissons le jour.
Mme devant la nuit d’ombre barricade,
Aimant en nous, par dessus tout, l’ide
Que bellement nous nous faisons de notre amour.
Comme aux ges nafs, je t’ai donn mon cur,
Ainsi qu’une ample fleur
Qui s’ouvre, au clair de la rose ,
Entre ses plis frles, ma bouche s’est pose.
La fleur, je la cueillis au pr des fleurs en flamme ,
Ne lui dis rien : car la parole entre nous deux
Serait banale, et tous les mots sont hasardeux.
C’est travers les yeux que l’me coute une me.
La fleur qui est mon cur et mon aveu,
Tout simplement, tes lvres confie
Qu’elle est loyale et claire et bonne, et qu’on se fie
Au vierge amour, comme un enfant se fie Dieu.
Laissons l’esprit fleurir sur les collines,
En de capricieux chemins de vanit ,
Et faisons simple accueil la sincrit
Qui tient nos deux curs clairs, en ses mains cristallines ,
Et rien n’est beau comme une confession d’mes,
L’une l’autre, le soir, lorsque la flamme
Des incomptables diamants
Brle, comme autant d’yeux
Silencieux,
Le silence des firmaments.
Le printemps jeune et bnvole
Qui vt le jardin de beaut
Elucide nos voix et nos paroles
Et les trempe dans sa limpidit.
La brise et les lvres des feuilles
Babillent — et effeuillent
En nous les syllabes de leur clart.
Mais le meilleur de nous se gare
Et fuit les mots matriels ,
Un simple et doux lan muet
Mieux que tout verbe amarre
Notre bonheur son vrai ciel :
Celui de ton me, deux genoux,
Tout simplement, devant la mienne,
Et de mon me, deux genoux,
Trs doucement, devant la tienne.
Viens lentement t’asseoir
Prs du parterre, dont le soir
Ferme les fleurs de tranquille lumire,
Laisse filtrer la grande nuit en toi :
Nous sommes trop heureux pour que sa mer d’effroi
Trouble notre prire.
L-haut, le pur cristal des toiles s’claire.
Voici le firmament plus net et translucide
Qu’un tang bleu ou qu’un vitrail d’abside ,
Et puis voici le ciel qui regarde travers.
Les mille voix de l’norme mystre
Parlent autour de toi.
Les mille lois de la nature entire
Bougent autour de toi,
Les arcs d’argent de l’invisible
Prennent ton me et son lan pour cible,
Mais tu n’as peur, oh ! simple cur,
Mais tu n’as peur, puisque ta foi
Est que toute la terre collabore
A cet amour que fit clore
La vie et son mystre en toi.
Joins donc les mains tranquillement
Et doucement adore ,
Un grand conseil de puret
Et de divine intimit
Flotte, comme une trange aurore,
Sous les minuits du firmament.
Combien elle est facilement ravie,
Avec ses yeux d’extase igne,
Elle, la douce et rsigne
Si simplement devant la vie.
Ce soir, comme un regard la surprenait fervente,
Et comme un mot la transportait
Au pur jardin de joie, o elle tait
Tout la fois reine et servante.
Humble d’elle, mais ardente de nous,
C’tait qui ploierait les deux genoux,
Pour recueillir le merveilleux bonheur
Qui, mutuel, nous dbordait du cur.
Nous coutions se taire, en nous, la violence
De l’exaltant amour qu’emprisonnaient nos bras
Et le vivant silence
Dire des mots que nous ne savions pas.
Au temps o longuement j’avais souffert
O les heures m’taient des piges,
Tu m’apparus l’accueillante lumire
Qui luit, aux fentres, l’hiver,
Au fonds des soirs, sur de la neige.
Ta clart d’me hospitalire
Frla, sans le blesser, mon cur,
Comme une main de tranquille chaleur ,
Un espoir tide, un mot clment,
Pntrrent en moi trs lentement ,
Puis vint la bonne confiance
Et la franchise et la tendresse et l’alliance,
Enfin, de nos deux mains amies,
Un soir de claire entente et de douce accalmie.
Depuis, bien que l’t ait succd au gel,
En nous-mmes et sous le ciel,
Dont les flammes ternises
Pavoisent d’or tous les chemins de nos penses,
Et que l’amour soit devenu la fleur immense,
Naissant du fier dsir,
Qui, sans cesse, pour mieux encor grandir,
En notre cur, se recommence,
Je regarde toujours la petite lumire
Qui me fut douce, la premire.
Je ne dtaille pas, ni quels nous sommes
L’un pour l’autre, ni les pourquois, ni les raisons :
Tout doute est mort, en ce jardin de floraisons
Qui s’ouvre en nous et hors de nous, si loin des hommes.
Je ne raisonne pas, et ne veux pas savoir,
Et rien ne troublera ce qui n’est que mystre
Et qu’lans doux et que ferveur involontaire
Et que tranquille essor vers nos parvis d’espoir.
Je te sens claire avant de te comprendre telle ,
Et c’est ma joie, infiniment,
De m’prouver si doucement aimant,
Sans demander pourquoi ta voix m’appelle.
Soyons simples et bons — et que le jour
Nous soit tendresse et lumire servies,
Et laissons dire que la vie
N’est point faite pour un pareil amour.
A ces reines qui lentement descendent
Les escaliers en ors et fleurs de la lgende,
Dans mon rve, parfois, je t’apparie ,
Je te donne des noms qui se marient
A la clart, la splendeur et la joie,
Et bruissent en syllabes de soie,
Au long des vers btis comme une estrade
Pour la danse des mots et leurs belles parades.
Mais combien vite on se lasse du jeu,
A te voir douce et profonde et si peu
Celle dont on enjolive les attitudes ,
Ton front si clair et pur et blanc de certitude,
Tes douces mains d’enfant en paix sur tes genoux,
Tes seins se soulevant au rythme de ton pouls
Qui bat comme ton cur immense et ingnu,
Oh ! comme tout, hormis cela et ta prire,
Oh ! comme tout est pauvre et vain, hors la lumire
Qui me regarde et qui m’accueille en tes yeux nus.
Je ddie tes pleurs, ton sourire,
Mes plus douces penses,
Celles que je te dis, celles aussi
Qui demeurent imprcises
Et trop profondes pour les dire.
Je ddie tes pleurs, ton sourire
A toute ton me, mon me,
Avec ses pleurs et ses sourires
Et son baiser.
Vois-tu, l’aurore nat sur la terre efface,
Des liens d’ombre semblent glisser
Et s’en aller, avec mlancolie ,
L’eau des tangs s’coule et tamise son bruit,
L’herbe s’claire et les corolles se dplient,
Et les bois d’or se dsenlacent de la nuit.
Oh ! dis, pouvoir un jour,
Entrer ainsi dans la pleine lumire ,
Oh ! dis, pouvoir un jour
Avec toutes les fleurs de nos mes trmires,
Sans plus aucun voile sur nous,
Sans plus aucun mystre en nous,
Oh dis, pouvoir, un jour,
Entrer deux dans le lucide amour !
Je noie en tes deux yeux mon me toute entire
Et l’lan fou de cette me perdue,
Pour que, plonge en leur douceur et leur prire,
Plus claire et mieux trempe, elle me soit rendue.
S’unir pour purer son tre,
Comme deux vitraux d’or en une mme abside
Croisent leurs feux diffremment lucides
Et se pntrent !
Je suis parfois si lourd, si las,
D’tre celui qui ne sait pas
Etre parfait, comme il se veut !
Mon cur se bat contre ses vux,
Mon cur dont les plantes mauvaises,
Entre des rocs d’enttement,
Dressent, sournoisement,
Leurs fleurs d’encre ou de braise ,
Mon cur si faux, si vrai, selon les jours,
Mon cur contradictoire,
Mon cur exagr toujours
De joie immense ou de crainte attentatoire.
Pour nous aimer des yeux,
Lavons nos deux regards, de ceux
Que nous avons croiss, par milliers, dans la vie
Mauvaise et asservie.
L’aube est en fleur et en rose
Et en lumire tamise
Trs douce :
On croirait voir de molles plumes
D’argent et de soleil, travers brumes,
Frler et caresser, dans le jardin, les mousses.
Nos bleus et merveilleux tangs
Tremblent et s’animent d’or miroitant,
Des vols merauds, sous les arbres, circulent ,
Et la clart, hors des chemins, des clos, des haies,
Balaie
La cendre humide, o trane encor le crpuscule.
Au clos de notre amour, l’t se continue :
Un paon d’or, l-bas traverse une avenue ,
Des ptales pavoisent,
— Perles, meraudes, turquoises —
L’uniforme sommeil des gazons verts ,
Nos tangs bleus luisent, couverts
Du baiser blanc des nnuphars de neige ,
Aux quinconces, nos groseillers font des cortges ,
Un insecte de prisme irrite un cur de fleur ,
De merveilleux sous-bois se jaspent de lueurs ,
Et, comme des bulles lgres, mille abeilles
Sur des grappes d’argent, vibrent, au long des treilles.
L’air est si beau qu’il parat chatoyant ,
Sous les midis profonds et radiants,
On dirait qu’il remue en roses de lumire ,
Tandis qu’au loin, les routes coutumires,
Telles de lents gestes qui s’allongent vermeils,
A l’horizon nacr, montent vers le soleil.
Certes, la robe en diamants du bel t
Ne vt aucun jardin d’aussi pure clart ,
Et c’est la joie unique close en nos deux mes
Qui reconnait sa vie en ces bouquets de flammes.
Que tes yeux clairs, tes yeux d’t,
Me soient, sur terre,
Les images de la bont.
Laissons nos mes embrases
Exalter d’or chaque flamme de nos penses.
Que mes deux mains contre ton cur
Te soient, sur terre,
Les emblmes de la douceur.
Vivons pareils deux prires perdues
L’une vers l’autre, toute heure, tendues.
Que nos baisers sur nos bouches ravies
Nous soient sur terre,
Les symboles de notre vie.
Dis-moi, ma simple et ma tranquille amie,
Dis, combien l’absence, mme d’un jour,
Attriste et attise l’amour
Et le rveille, en ses brlures endormies.
Je m’en vais au devant de ceux
Qui reviennent des lointains merveilleux,
O, ds l’aube, tu es alle ,
Je m’assieds sous un arbre, au dtour de l’alle,
Et, sur la route, piant leur venue,
Je regarde et regarde, avec ferveur, leurs yeux
Encore clairs de t’avoir vue.
Et je voudrais baiser leurs doigts qui t’ont touche,
Et leur crier des mots qu’ils ne comprendraient pas,
Et j’coute longtemps se cadencer leurs pas
Vers l’ombre, o les vieux soirs tiennent la nuit penche.
En ces heures o nous sommes perdus
Si loin de tout ce qui n’est pas nous-mmes.
Quel sang lustral ou quel baptme
Baigne nos curs vers tout l’amour tendus ?
Joignant les mains, sans que l’on prie,
Tendant les bras, sans que l’on crie,
Mais adorant on ne sait quoi
De plus lointain et de plus pur que soi,
L’esprit fervent et ingnu,
Dites, comme on se fond, comme on se vit dans l’inconnu.
Comme on s’abme en la prsence
De ces heures de suprme existence,
Comme l’me voudrait des cieux
Pour y chercher de nouveaux dieux,
Oh ! l’angoissante et merveilleuse joie
Et l’esprance audacieuse
D’tre, un jour, travers la mort mme, la proie
De ces affres silencieuses.
Oh ! ce bonheur
Si rare et si frle parfois
Qu’il nous fait peur !
Nous avons beau taire nos voix,
Et nous faire comme une tente,
Avec toute ta chevelure,
Pour nous crer un abri sr,
Souvent l’angoisse en nos mes fermente.
Mais notre amour tant comme un ange genoux,
Prie et supplie,
Que l’avenir donne d’autres que nous
Mme tendresse et mme vie,
Pour que leur sort de notre sort ne soit jaloux.
Et puis, aux jours mauvais, quand les grands soirs
Illimitent, jusques au ciel, le dsespoir,
Nous demandons pardon la nuit qui s’enflamme
De la douceur de notre me.
Vivons, dans notre amour et notre ardeur,
Vivons si hardiment nos plus belles penses
Qu’elles s’entrelacent, harmonises
A l’extase suprme et l’entire ferveur.
Parce qu’en nos mes pareilles,
Quelque chose de plus sacr que nous
Et de plus pur et de plus grand s’veille,
Joignons les mains pour l’adorer travers nous.
Il n’importe que nous n’ayons que cris ou larmes
Pour humblement le dfinir,
Et que si rare et si puissant en soit le charme,
Qu’ le goter, nos curs soient prts dfaillir.
Restons quand mme et pour toujours, les fous
De cet amour presqu’implacable,
Et les fervents, deux genoux,
Du Dieu soudain qui rgne en nous,
Si violent et si ardemment doux
Qu’il nous fait mal et nous accable.
Sitt que nos bouches se touchent,
Nous nous sentons tant plus clairs de nous-mmes
Que l’on dirait des Dieux qui s’aiment
Et qui s’unissent en nous-mmes ,
Nous nous sentons le cur si divinement frais
Et si renouvel par leur lumire
Premire
Que l’univers, sous leur clart, nous apparat.
La joie est nos yeux l’unique fleur du monde
Qui se prodigue et se fconde,
Innombrable, sur nos routes d’en bas ,
Comme l haut, par tas,
En des pays de soie o voyagent des voiles
Brille la fleur myriadaire des toiles.
L’ordre nous blouit, comme les feux, la cendre,
Tout nous claire et nous parat : flambeau ,
Nos plus simples mots ont un sens si beau
Que nous les rptons pour les sans cesse entendre.
Nous sommes les victorieux sublimes
Qui conqurons l’ternit,
Sans nul orgueil et sans songer au temps minime :
Et notre amour nous semble avoir toujours t.
Pour que rien de nous deux n’chappe notre treinte,
Si profonde qu’elle en est sainte
Et qu’ travers le corps mme, l’amour soit clair,
Nous descendons ensemble au jardin de ta chair.
Tes seins sont l, ainsi que des offrandes,
Et tes deux mains me sont tendues ,
Et rien ne vaut la nave provende
Des paroles dites et entendues.
L’ombre des rameaux blancs voyage
Parmi ta gorge et ton visage
Et tes cheveux dnouent leur floraison,
En guirlandes, sur les gazons.
La nuit est toute d’argent bleu,
La nuit est un beau lit silencieux,
La nuit douce, dont les brises vont, une une,
Effeuiller les grands lys dards au clair de lune.
Bien que dj, ce soir,
L’automne
Laisse aux sentes et aux ores,
Comme des mains dores,
Lentes, les feuilles choir ,
Bien que dj l’automne,
Ce soir, avec ses bras de vent,
Moissonne
Sur les rosiers fervents,
Les ptales et leur pleur,
Ne laissons rien de nos deux mes
Tomber soudain avec ces fleurs.
Mais tous les deux autour des flammes
De l’tre en or du souvenir,
Mais tous les deux blottissons-nous,
Les mains au feu et les genoux.
Contre les deuils craindre ou venir,
Contre le temps qui fixe toute ardeur sa fin,
Contre notre terreur, contre nous-mmes, enfin,
Blottissons-nous, prs du foyer,
Que la mmoire en nous fait flamboyer.
Et si l’automne obre
A grands pans d’ombre et d’orages plnants,
Les bois, les pelouses et les tangs,
Que sa douleur du moins n’altre
L’intrieur jardin tranquillis,
O s’unissent, dans la lumire,
Les pas gaux de nos penses.
Le don du corps, lorsque l’me est donne
N’est rien que l’aboutissement
De deux tendresses entranes
L’une vers l’autre, perdment.
Tu n’es heureuse de ta chair
Si simple, en sa beaut natale,
Que pour, avec ferveur, m’en faire
L’offre complte et l’aumne totale.
Et je me donne toi, ne sachant rien
Sinon que je m’exalte te connatre,
Toujours meilleure et plus pure peut-tre
Depuis que ton doux corps offrit sa fte au mien.
L’amour, oh ! qu’il nous soit la clairvoyance
Unique, et l’unique raison du cur,
A nous, dont le plus fol bonheur
Est d’tre fous de confiance.
Ft-il en nous une seule tendresse,
Une pense, une joie, une promesse,
Qui n’allt, d’elle-mme, au devant de nos pas ?
Ft-il une prire en secret entendue,
Dont nous n’ayons serr les mains tendues
Avec douceur, sur notre sein ?
Ft-il un seul appel, un seul dessein,
Un vu tranquille ou violent
Dont nous n’ayons panoui l’lan ?
Et, nous aimant ainsi,
Nos curs s’en sont alls, tels des aptres,
Vers les doux curs timides et transis
Des autres :
Ils les ont convis, par la pense,
A se sentir aux ntres fiancs,
A proclamer l’amour avec des ardeurs franches,
Comme un peuple de fleurs aime la mme branche
Qui le suspend et le baigne dans le soleil ,
Et notre me, comme agrandie, en cet veil,
S’est mise clbrer tout ce qui aime,
Magnifiant l’amour pour l’amour mme,
Et chrir, divinement, d’un dsir fou,
Le monde entier qui se rsume en nous.
Le beau jardin fleuri de flammes
Qui nous semblait le double ou le miroir,
Du jardin clair que nous portions dans l’me,
Se cristallise en gel et or, ce soir.
Un grand silence blanc est descendu s’asseoir
L-bas, aux horizons de marbre,
Vers o s’en vont, par dfils, les arbres
Avec leur ombre immense et bleue
Et rgulire, ct d’eux.
Aucun souffle de vent, aucune haleine.
Les grands voiles du froid,
Se dplient seuls, de plaine en plaine,
Sur des marais d’argent ou des routes en croix.
Les toiles paraissent vivre.
Comme l’acier, brille le givre,
A travers l’air translucide et glac.
De clairs mtaux pulvriss
A l’infini, semblent neiger
De la pleur d’une lune de cuivre.
Tout est scintillement dans l’immobilit.
Et c’est l’heure divine, o l’esprit est hant
Par ces mille regards que projette sur terre,
Vers les hasards de l’humaine misre,
La bonne et pure et inchangeable ternit.
S’il arrive jamais
Que nous soyons, sans le savoir,
Souffrance ou peine ou dsespoir,
L’un pour l’autre , s’il se faisait
Que la fatigue ou le banal plaisir
Dtendissent en nous l’arc d’or du haut dsir ,
Si le cristal de la pure pense
De notre amour doit se briser,
Si malgr tout, je me sentais
Vaincu pour n’avoir pas t
Assez en proie la divine immensit
De la bont ,
Alors, oh ! serrons-nous comme deux fous sublimes
Qui sous les cieux casss, se cramponnent aux cimes
Quand mme. — Et d’un unique essor
L’me en soleil, s’exaltent dans la mort.
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LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE
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promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works,
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that arise directly or indirectly from any of the following which you do
or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm
work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any
Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause.
Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm
Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
electronic works in formats readable by the widest variety of computers
including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists
because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from
people in all walks of life.
Volunteers and financial support to provide volunteers with the
assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm’s
goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations.
To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation
and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4
and the Foundation web page at http://www.pglaf.org.
Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive
Foundation
The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
Revenue Service. The Foundation’s EIN or federal tax identification
number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at
http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent
permitted by U.S. federal laws and your state’s laws.
The Foundation’s principal office is located at 4557 Melan Dr. S.
Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered
throughout numerous locations. Its business office is located at
809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email
business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact
information can be found at the Foundation’s web site and official
page at http://pglaf.org
For additional contact information:
Dr. Gregory B. Newby
Chief Executive and Director
gbnewby@pglaf.org
Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation
Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
spread public support and donations to carry out its mission of
increasing the number of public domain and licensed works that can be
freely distributed in machine readable form accessible by the widest
array of equipment including outdated equipment. Many small donations
($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
status with the IRS.
The Foundation is committed to complying with the laws regulating
charities and charitable donations in all 50 states of the United
States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
with these requirements. We do not solicit donations in locations
where we have not received written confirmation of compliance. To
SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any
particular state visit http://pglaf.org
While we cannot and do not solicit contributions from states where we
have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
against accepting unsolicited donations from donors in such states who
approach us with offers to donate.
International donations are gratefully accepted, but we cannot make
any statements concerning tax treatment of donations received from
outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.
Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
ways including including checks, online payments and credit card
donations. To donate, please visit: http://pglaf.org/donate
Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic
works.
Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm
concept of a library of electronic works that could be freely shared
with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project
Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support.
Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S.
unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily
keep eBooks in compliance with any particular paper edition.
Each eBook is in a subdirectory of the same number as the eBook’s
eBook number, often in several formats including plain vanilla ASCII,
compressed (zipped), HTML and others.
Corrected EDITIONS of our eBooks replace the old file and take over
the old filename and etext number. The replaced older file is renamed.
VERSIONS based on separate sources are treated as new eBooks receiving
new filenames and etext numbers.
Most people start at our Web site which has the main PG search facility:
http://www.gutenberg.net
This Web site includes information about Project Gutenberg-tm,
including how to make donations to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to
subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.
EBooks posted prior to November 2003, with eBook numbers BELOW #10000,
are filed in directories based on their release date. If you want to
download any of these eBooks directly, rather than using the regular
search system you may utilize the following addresses and just
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filed in a different way. The year of a release date is no longer part
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identical to the filename). The path to the file is made up of single
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